mardi 14 juillet 2015

"Studs Terkel Working" sous la direction de P. Buhle (Editions çà et là)

Aux Etats-Unis Studs Terkel (1912-2008) est bien connu du milieu radiophonique pour ces illustres inteviews. Ses sujets de prédilection : l'homme, la société américaine et son évolution. Que du sérieux et du bien documenté. Peu après sa mort, Paul Buhle décide de superviser une adaptation graphique de ces témoignages : ainsi avec l'aide de Harvey Pekar, il fait appel à quelques uns des plus talentueux auteurs de la scène indépendante pour offrir un album absolument passionnant "Studs Terkel Working".
On part donc à la rencontre d'hommes et de femmes qui parfois se sont tués à la tâche, ont exercé leur profession avec une passion inimaginable, affronté les dures lois du marché, les préjugés, ou enchaîné les emplois pour à peine survivre. On ressent chacun de leur état d'âme : l'épuisement physique et moral, la frustation, la satisfaction du travail bien accompli ou l'envie de poursuivre autant que le corps suit.
Mon préféré, Elmer Ruiz le fossoyeur et son respect pour les morts :"Il y a environ cinq ans, on a eu un enterrement, le bonhomme pesait 180 KILOS. Il tenait pas dans le descendeur. On a bien un gros tracteur qu'on aurait pu prendre, mais CA AURAIT PAS FAIT BIEN, parce que descendre un cerceuil avec un tracteur, c'est comme si on descendait n'importe quoi. Faut du RESPECT... On l'a fait à la main. On était une demi-douzaine de gars."
Cet album, c'est une peinture de la société, pas seulement américaine : ces destins pourraient se vivre dans n'importe quel pays, à n'importe quelle époque passée présente et future. Il pourrait illustrer un cours d'histoire, de sociologie ou d'arts plastiques car chaque dessinateur apporte son univers graphique.

lundi 6 juillet 2015

"Rouge comme la neige" de C. De Metter (Casterman)

1896, dans l'hiver mordant du Colorado tentent de survivre Joddy MacKinley et son fils, sans pouvoir oublier la mort de son mari et surtout la disparition de sa fille six ans auparavant. Un jour un inconnu frappe à la porte de leur cabane et tout pourrait bien changer : dans la ville voisine un homme a été arrêté pour tentative d'enlèvement de môme. Il s'appelle Buck MacFly, et s'il détenait des informations sur son enfant chérie? Ni une ni deux, elle embarque fils et flingue afin de rencontrer le prisonnier en secret. Du fond de la cellule émergent des révélations pleines d'espoir, Joddy joue alors le tout pour le tout : elle fait évader Buck et les voilà partis pour une chevauchée blanche comme la neige et rouge comme le sang à travers les Rocheuses.
Bien, étant fan de western et une inconditionnelle de C. De Metter depuis ses débuts, cet album ne pouvait que me ravir. Incroyable comme cet homme maîtrise tous les genres, la chronique sociale ("Emma" ou "Le Curé"), le drame historique ("Le sang des Valentine"), le thriller ("Scarface") et maintenant le western crépusculaire. L'histoire est sombre, très sombre et désespérée, quant au dessin, il est à se prosterner comme d'habitude : monochrome et des traits de crayon apparents. "Rouge comme la neige" est une pépite à contempler avec admiration, à examiner dans tous les recoins, à chérir quelque part dans sa bibliothèque.