dimanche 22 novembre 2009

"Mildred Pierce" de J. M. Cain (Gallimard)


Mildred Pierce a 28 ans, mariée à un oisif, 2 enfants et du courage à revendre. C'est qu'il en faut dans l'Amérique des années 30. Pour s'en sortir, elle décide un beau jour de se séparer de son mari, elle fin cordon bleu vivra de sa cuisine. Tout d'abord serveuse, elle vend sa spécialité, des "pies", et observe beaucoup. 2 filles à élever cela en coûtent des dollars, aussi se lance-t-elle dans les affaires en ouvrant d'abord un restaurant, puis un deuxième et un troisième.
James M. Cain nous fait cheminer auprès de sa "Mildred Pierce" durant une dizaine d'années, une tranche de vie marquée par le dur labeur, la souffrance, les sacrifices pour juste quelques instants de bonheur ça et là. C'est que dans l'ombre de la réussite grandit Véda, la fille aînée, une enfant gâtée qui sous des airs d'ange se révèle au fil du temps manipulatrice, méprisante et ambitieuse.
Datant de 1941, c'est un bien magnifique roman que voilà, émouvant portrait de femme et peinture sociale d'une époque en crise.

mardi 17 novembre 2009

"2012" de R. Emmerich


Bien, autant le dire de suite, si vous n'êtes ni riche (même la dernière cagnotte du loto à 7 chiffres ne suffira pas), ni d'une famille puissante, ni d'une intelligente très très supérieure (genre bac + 9), et bien votre existence s'arrêtera en 2012. Et vi, c'est l'année de la fin du monde, les Mayas y croyaient, R. Emmerich aussi. Quel fataliste celui-là, mais il aime le grandiose : si l'homme doit disparaître, ce ne sera pas sans se battre, il a trop de valeurs à défendre (la famille, rien de tel qu'une catastrophe pour ressouder les liens), et une foi inébranlable (c'est un peu une manie de prier quand tout s'effondre).
L'humanité avait déjà beaucoup souffert dans "Le jour d'après", la menace venait du ciel sous forme de cyclones. Dans "2012" elle provient d'encore plus loin, du soleil et de ses irruptions, bizarrement, notre terre n'aime pas du tout et gronde au plus profond d'elle-même. A la surface, c'est le chaos, pas une parcelle n'est épargnée. Mais l'homme (enfin l'élite gouvernementale et scientifique) avait tout prévu pour sauvegarder le meilleur de son espèce...
"2012" dure près de 2h30, les images sont spectaculaires (mais n'est-ce pas le moindre pour un film catastrophe?), c'est pas mal pour se vider la tête car le reste fleure bon la morale américaine et le scénario invraisemblable.

lundi 16 novembre 2009

"Des souris et des hommes" de P-A Bertola (Delcourt)


Jolie découverte : Pierre-Alain Bertola, scénographe, peintre, illustrateur, et parfois dessinateur de bd. Après 2 albums aus éditions Futuropolis, il est de retour chez Delcourt avec l'adaptation du très estimé "Des souris et des hommes" de J. Steinbeck.
Le résultat est franchement magnifique, un crayon fin, de l'aquarelle, et de l'eau pour nuancer le noir en tout plein de gris. Le dessin est subtil et l'ambiance poétique malgré le contexte historique, l'Amérique profonde des années 30, sa société violente et raciste. De plus, P-A Bertola demeure très fidèle au texte, à sa continuité, intercalant des extraits ça et là et c'est avec tendresse que nous suivons l'itinéraire de George et Lennie.

samedi 7 novembre 2009

"Elizabeth Bathory" de P. Croci et F-S Pauly (Emmanuel Proust)


Elizabeth Bathory, une comtesse hongroise du XVI° siècle, avait des moeurs quelques peu étranges. Mariée très jeune et malgré elle à un rustre libidineux heureusement souvent absent, elle préférait la compagnie féminine. Sa beauté fascinait et sa hantise était de la voir se flétrir. Point de crème sophistiquée à l'époque, non, son truc pour ne pas vieillir : suspendre au-dessus de sa baignoire des jeunes filles et se prélasser dans leur sang dégoulinant. Autant dire qu'un tel personnage historique a beaucoup inspiré historiens, écrivains et maintenant dessinateurs.
P. Croci a un faible pour les grandes dames vénéneuses, après "Gloriande de Thémines" et "Lady Tara Cornwall", le voilà qu'il nous offre sa version sur cette comtesse sanguinaire. Il fait un clin d'oeil à son autre personnage favori, Dracula : lors de son voyage retour vers l'Angleterre, le jeune Jonathan Harker se plonge dans la lecture d'un manuscrit donné par une des soeurs de l'hôpital et découvre l'univers décadent et gothique d'Elizabeth Bathory.
L'album est comme d'habitude somptueux, en couleur directe. A noter les doubles pages sur les paysages enneigés, d'une beauté saisissante, auxquelles s'opposent les intérieurs gothiques du château, théâtre de scènes d'une intolérable cruauté.

lundi 2 novembre 2009

"Un prophète" de J. Audiard


En 6 ans, il peut s'en passer des choses dans la vie d'un homme. Malik a 19 ans, il n'a l'air de rien, c'est juste une petite frappe analphabète pas bien méchante. Là il vient d'écoper d'une peine de prison ferme et le voilà derrière les barreaux. Ah l'univers carcéral, ses clans, son code, ses trafics... où le dernier arrivé est jaugé, testé. A la centrale de Brécourt règnent principalement les Corses et les Musulmans ; curieusement ce sont les Corses qui les premiers lui mettent la main dessus, l'enrôlant de force. Il devient leur larbin et sait peu à peu gagner la confiance du parrain. Il est malin Malik, apprend vite et s'il a l'air de se soumettre, c'est pour mieux développer son propre trafic hors les murs et se faire accepter par les Musulmans. En 6 ans le petit malfrat se métamorphose, il est entré jeune délinquant, il ressort caïd.
Telle est l'histoire du "Prophète" de J. Audiard, brute et sans concession, une histoire d'initiation. Un traitement réaliste sans fioriture et une interprétation remarquable. Largement de quoi entrer dans l'Histoire du cinéma.